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Focus : Exposition Hélène BERR

Mise à jour le 25/01/2024
Dans le cadre de la Journée en Mémoire des Victimes de l’Holocauste, le samedi 27 janvier, date correspondant à la Libération du camp de concentration d'Auschwitz en 1945, la Mairie du 6e accueille l’exposition « Hélène BERR », composée par le Mémorial de la Shoah.
L’exposition est ouverte à tous jusqu’au 8 février.
Hélène Berr a 20 ans lorsqu'elle entame son journal intime en 1942. Jeune française de confession juive, elle rédige, entre 1942 et 1944, un journal intime d’une rare intensité. Ces pages témoignent de la vie d'une jeune femme éprise de littérature, de musique, entourée d'amis, amoureuse. Parallèlement à sa vie pleine d'espoir, elle relate la progression graduelle des mesures antisémites, le port de l'étoile jaune, puis les arrestations en pleine rue, celles des enfants, soudain sans parents, massés parqués dans des centres vers les camps de la mort.
Le « Journal » d'Hélène Berr se présente sous la forme de 262 feuillets volants, couverts à l'encre bleue ou noire et au crayon d'une fine écriture qui se fait de plus en plus hâtive au fil des pages. C'est Mariette Job, nièce d'Hélène Berr et ancienne libraire, qui, connaissant ce texte par des copies circulant dans sa famille, a retrouvé le manuscrit original : selon le vœu d'Hélène, il avait été remis après la guerre à Jean Morawiecki, son fiancé, et était resté entre ses mains. En 2002, le document a fait l'objet d'une donation au Mémorial de la Shoah, à Paris,.
Hélène Berr notera notamment, le soir du lundi 8 juin 42, alors qu’elle aura porté pour la première fois, l’Etoile Jaune, fixée à sa boutonnière par un bouquet tricolore :

« Lundi soir.
Mon Dieu, je ne croyais pas que ce serait si dur. J'ai eu beaucoup de courage toute la journée. J'ai porté la tête haute, et j'ai si bien regardé les gens en face qu'ils détournaient les yeux. Mais c'est dur. D'ailleurs, la majorité des gens ne regarde pas. Le plus pénible, c'est de rencontrer d'autres gens qui l'ont. Ce matin, je suis partie avec Maman. Deux gosses dans la rue nous ont montrées du doigt en disant : « Hein ? T'as vu ? Juif. » Mais le reste s'est passé normalement. Place de la Madeleine, nous avons rencontré M. Simon, qui s'est arrêté et est descendu de bicyclette. J'ai repris toute seule le métro jusqu'à l'Etoile. A l'Etoile, je suis allée à l'Artisanat chercher ma blouse, puis j'ai repris le 92. Un jeune homme et une jeune fille attendaient, j'ai vu la jeune fille me montrer à son compagnon. Puis ils ont parlé. Instinctivement, j'ai relevé la tête-en plein soleil-, j'ai entendu : "C'est écœurant." Dans l'autobus, il y avait une femme, une maid [domestique] probablement, qui m'avait déjà souri avant de monter et qui s'est retournée plusieurs fois pour sourire ; un monsieur chic me fixait : je ne pouvais pas deviner le sens de ce regard, mais je l'ai regardé fixement. Je suis repartie pour la Sorbonne ; dans le métro, encore une femme du peuple m'a souri. Cela a fait jaillir les larmes à mes yeux, je ne sais pourquoi. Au Quartier latin, il n'y avait pas grand monde. Je n'ai rien eu à faire à la bibliothèque. Jusqu'à quatre heures, j'ai traîné, j'ai rêvé, dans la fraîcheur de la salle, où les stores baissés laissaient pénétrer une lumière ocrée. A quatre heures, J. M. [Jean Morawiecki] est entré. C'était un soulagement de lui parler. Il s'est assis devant le pupitre et est resté là jusqu'au bout, à bavarder, et même sans rien dire. Il est parti une demi-heure chercher des billets pour le concert de mercredi ; Nicole est arrivée entre-temps. Quand tout le monde a eu quitté la bibliothèque, j'ai sorti ma veste et je lui ai montré l'étoile. Mais je ne pouvais pas le regarder en face, je l'ai ôtée et j'ai mis le bouquet tricolore qui la fixait à ma boutonnière. Lorsque j'ai levé les yeux, j'ai vu qu'il avait été frappé en plein cœur. Je suis sûre qu'il ne se doutait de rien. Je craignais que toute notre amitié ne fût soudain brisée, amoindrie par cela. Mais après, nous avons marché jusqu'à Sèvres-Babylone, il a été très gentil. Je me demande ce qu'il pensait. […]
»
31 décembre 1943, elle écrit : «Quand j'écris "juif" je ne traduis pas ma pensée, car pour moi une pareille distinction n'existe pas : je ne me sens pas différente des autres hommes, jamais je n'arriverai à me considérer comme faisant partie d'un groupe humain séparé, peut-être est-ce pour cela que je souffre tellement, parce que je ne comprends plus. Je souffre de la méchanceté humaine. Je souffre de voir le mal s’abattre sur l’humanité ; mais je ne sens pas que je fais partie d’aucun groupe racial religieux, humain, je n’ai que pour me soutenir que mes débats et mes réactions, ma conscience personnelle.»
Ces derniers mots, « Horror, Horror, Horror » ponctuent ses écrits quelques heures avant son arrestation, en mars 1944 et sa déportation ainsi que celle de ses parents, à Auschwitz.

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